Récit de la transition : Communs

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Définition

Définition : Une communauté organisée autour des communs se soucie des ressources, et s’auto-organise de manière démocratique et responsable autour de celles-ci.

On parle de commun chaque fois qu’une communauté de personnes est animée par le même désir de prendre en charge une ressource (naturelle, matérielle ou immatérielle) dont elle hérite ou qu’elle crée, et qu’elle s’auto-organise de manière démocratique, conviviale et responsable pour en assurer l’accès, l’usage et la pérennité dans l’intérêt général et le souci du « bien vivre » ensemble et du bien vivre des générations à venir.


Ce qu’on déconstruit

Déconstruction : L’idéologie dominante valorise la propriété privée comme étant le meilleur moyen de gérer les ressources

Le système capitaliste repose sur l’accumulation des richesses matérielles et immatérielles sous forme de propriété privée. L’idéologie dominante valorise la propriété privée comme étant le meilleur moyen de gérer les ressources et d’en tirer le plus grand profit. Cette idée est une construction sociale bâtie au fur et à mesure du développement du capitalisme, qui a aujourd’hui contaminé l’ensemble des sphères de notre société jusqu’à l’appropriation de semences, d’espèces végétales et de savoir-faire ancestraux à l’aide de droits de propriété intellectuelle. Elle repose sur le mythe que les ressources sont mieux gérées par les personnes qui les possèdent, car ces dernières chercheraient toujours à en tirer le maximum et ne les dégraderaient donc pas au risque de leur faire perdre leur valeur. Cette idée renforce le caractère individualiste de notre société, au sein de laquelle la réussite d’un individu se mesure par ses possessions personnelles et le contrôle qu’il a sur celles-ci. L’investissement dans des activités spéculatives (immobilier, actions et parts dans des entreprises) à des fins d’enrichissement individuel est vu comme une manière légitime de réussir sa vie. Or, le système actuel, organisé autour d’une recherche de profit rapide, ne garantit pas que les ressources soient préservées sur le long terme grâce à la propriété privée. Au contraire, nous voyons avec les dégradations liées à l’extractivisme et la diminution des réserves d’énergies fossiles que l’appropriation de ressources non renouvelables et leur exploitation conduisent à leur disparition. En outre, l’appropriation des ressources naturelles, matérielles comme immatérielles, est un facteur important d’inégalités sociales et économiques et prive les moins nantis de biens essentiels (comme le logement, l’accès à des terres agricoles, l’accès aux connaissances et aux savoirs, etc.). De plus, le système de la propriété privée ne permet pas une juste répartition des richesses, alors que les coûts sociaux et environnementaux de la dégradation de ces ressources sont payés collectivement.

Finalement, l’enjeu n’est pas seulement économique, il est aussi politique. En effet, ce modèle induit une forme de gouvernance peu (ou pas) démocratique, puisque ce sont les personnes et entités économiques possédantes qui ont le pouvoir de décision sur la gestion de ressources souvent utiles, voire essentielles à tous et toutes.


Ce à quoi on aspire

Aspiration : La propriété collective devient la norme.

Nous voulons une économie des communs, au sein de laquelle les ressources sont gérées collectivement le plus possible, dans l’intérêt général. Cette économie n’est pas orientée vers la recherche de profit, mais vers l’enrichissement collectif, la juste répartition des ressources et la préservation de nos écosystèmes naturels et sociaux. Les biens et services ne sont plus privatisés, ils appartiennent au collectif et sont gérés par les règles que nous nous sommes données. La propriété collective devient la norme. La communauté se rassemble pour gérer collectivement les communs publics, à la fois les ressources à grande échelle comme l’eau, les forêts, les pêcheries ou les ressources plus locales comme les espaces collectifs ou les espaces verts.

Cela implique une nouvelle façon de concevoir la richesse. La richesse désigne pour nous l’épanouissement personnel et collectif, et la réussite de nos objectifs collectifs, au lieu du profit et de l’accumulation de possessions individuelles. Une société n’est riche que lorsque l’ensemble de ses membres y vivent dans la dignité et peuvent subvenir à leurs besoins, tant en matière de subsistance que de relations sociales. Nous mesurons la richesse de notre société à l’accès aux biens et services, à la juste répartition des richesses produites collectivement, au dynamisme de nos espaces collectifs et nous reconnaissons les avantages de contribuer à cette richesse collective.

La valorisation du collectif implique le respect des différences individuelles autant que l’accord sur des valeurs communes. Nous bâtissons des idéaux collectifs que tous et toutes embrassent et poursuivent par leurs actions. Notre organisation sociale n’est plus hiérarchique et pyramidale, mais organique, et chacun·e y a une place. Le collectif est notre force. Nous répondons aux besoins de tous et toutes de façon collective et équitable, dans le respect du bien commun et des limites de notre planète.


Comment on s’y rend

S’organiser ensemble pour permettre au collectif d’émerger

Dans un premier temps, nous encourageons les initiatives collectives et mettons de l’avant les bienfaits du travail en collaboration. Nous fonctionnons le plus possible sur un mode collaboratif et réapprenons à faire les choses ensemble, nous mettons en place des mécanismes pour consacrer du temps aux projets collectifs (incitatifs économiques, accompagnement de projets citoyens, journées consacrées au bénévolat dans les entreprises). Nous utilisons l’intelligence collective dans nos actions pour que tout le monde puisse trouver sa place dans l’élaboration de projets collectifs ou communs, pour donner envie aux citoyen·ne·s de participer à ces projets, et que ces actions collectives deviennent la norme dans la société. Le Forum Décider Rosemont ensemble est une démarche collective de mobilisation citoyenne dont le but est d’établir les priorités d’action pour le développement local du quartier Rosemont. Cette démarche, reproduite trois fois (2006, 2012, 2018), a permis d’établir collectivement des actions à réaliser pour les 5 ans à venir. Des priorités d’actions ont été établies à partir de plusieurs rencontres citoyennes dans des cafés et des centres communautaires, suivies par une journée de forum citoyen. Ces priorités ont ensuite été mises en œuvre par des comités citoyens, accompagnés par les organismes communautaires du quartier sur les thèmes du logement et de la gentrification, de l’accès à l’alimentation, de la mobilité, du verdissement, etc.

Renforcer la démocratie locale

Pour sensibiliser les populations à la gestion en commun des ressources, nous favorisons la coconstruction de décisions publiques au niveau local. Les municipalités mettent en place des mécanismes citoyens de consultation et de gestion de projets d’amélioration des milieux de vie. À Trois-Pistoles, les Assemblées citoyennes des Basques sont un espace de démocratie directe et non-partisane, qui permet aux citoyen·ne·s de s’exprimer sur les enjeux qui les touchent dans la MRC des Basques. À chaque rencontre, le ou les sujets discutés sont proposés et décidés par les participant·e·s et peuvent faire l’objet de rapports périodiques au conseil municipal de Trois-Pistoles.

Maximiser la gestion commune des espaces publics et communautaires

Moyens : Les bâtiments centraux dans les quartiers sont transformés en espaces de vie communautaire et de rassemblement, et l’on y trouve des ressources partagées.

Nous transformons des bâtiments centraux pour le quartier en communs (par exemple, une ancienne église, des lieux centraux non utilisés, etc.) pour y faire des lieux communautaires. Ces lieux de rassemblements sont dédiés à l’émergence de projets communs, au tissage de relations sociales, et on y trouve des ressources partagées ou en commun (véhicules, outils, cuisines, etc.). Les projets de tiers-lieux menés par Solon et le Bâtiment 7 sont des exemples de cette gestion commune d’espaces communautaires. Des groupes de citoyen·ne·s ou des membres d’organismes s’organisent ensemble pour décider des règles d’utilisation et des fonctions de ces espaces. À Montréal-Nord, la Voisinerie, un stationnement appartenant à un organisme gestionnaire de logements communautaires, a été transformée en espace de jardins et de jeux pour enfants. Cet espace est partagé entre un organisme communautaire, des résident·e·s des logements communautaires, le comité citoyen de jardinage et le CPE local. Les espaces publics comme les parcs ou les rues pourraient aussi être gérés en commun, les exemples de Bonheur Masson et de l’Oasis Bellechasse dans Rosemont–La Petite-Patrie le montrent. Les citoyen·ne·s ont collaboré pour les embellir et les animer pour améliorer leur milieu de vie, répondre aux besoins de lieux de rassemblements et de verdure dans leur quartier, et optimiser l’utilisation de ces lieux sous-utilisés.

Partager plutôt que posséder

Nous multiplions les initiatives prônant le partage des ressources plutôt que la possession individuelle. Les modèles de Locomotion ou de La Remise sont des exemples de gestion en commun de ressources. Les outils de La Remise et les vélos et remorques de Solon appartiennent à l’ensemble des membres qui les utilisent. Ils et elles communalisent les coûts d’achat et d’entretien et gèrent collectivement leur utilisation. Les bibliothèques publiques sont aussi des formes de communalisation : les livres appartiennent à la municipalité et donc à l’ensemble des résident·e·s, et leur usage est réglementé pour que tous et toutes puissent y avoir accès. Imaginons un monde dans lequel les voitures, les outils de bricolage ou de cuisine, les meubles, les vêtements, etc. seraient mis en commun. Ce partage des ressources permet ainsi de limiter la pression sur les ressources naturelles, en particulier les ressources non renouvelables. En partageant plus et en produisant moins, il devient possible de moins fabriquer, moins travailler et moins transporter.

Faire usage des communs numériques et en créer de nouveaux

Les espaces numériques peuvent aussi être mis en commun. Le plus connu est Wikipédia, gigantesque encyclopédie collaborative, devenue incontournable dans nos vies quotidiennes. Les articles qu’on y trouve sont produits et révisés par des internautes, la plateforme est financée par les dons des usagers plutôt que par la publicité. Passerelles, une plateforme éthique de collaboration et de mise en relation pour les citoyen·ne·s et les acteurs du développement collectif et de l’innovation sociale, est un autre exemple au Québec. Nous maximisons individuellement notre usage de ces communs numériques, plutôt que des outils numériques du GAFAM (acronyme désignant les cinq entreprises de technologies les plus populaires et les mieux cotées en bourse). Nous créons nous-mêmes nos outils en accord avec nos besoins et les contenus que nous souhaitons y trouver. Nous nous organisons collectivement pour financer et gérer ces outils numériques.

Faire du logement un bien commun

Nous mettons en place des réglementations favorisant l’habitat collectif (coopératives, co-habitat) afin de faire du logement un droit et de favoriser la gestion en commun du parc immobilier. Les résident·e·s de nos villes et villages peuvent ainsi se loger à moindres frais et partager collectivement les coûts reliés au logement, en dehors de la spéculation immobilière. Les formes d’habitats collectifs et coopératifs permettent de sortir les biens immobiliers de la spéculation et de favoriser le droit au logement pour tous et toutes. Il y en a plus de 1 300 au Québec, regroupant plus de 30 000 logements. Les membres s’impliquent démocratiquement dans la gestion de leurs coopératives. Les loyers servent à l’acquisition des logements par la coopérative (hypothèque), mais aussi à son entretien et non à l’enrichissement d’un propriétaire unique.

Une autre façon de contribuer à la société et de créer de la richesse dans la société

Nous valorisons le capital social des projets communs en mettant de l’avant les effets positifs sur la communauté (création de lien social, amélioration de la qualité de vie des résident·e·s, préservation des écosystèmes, etc.). Lorsque les projets génèrent des profits, ceux-ci sont redistribués dans la communauté et pas seulement aux initiateurs, par exemple en créant des fonds d’investissement pour d’autres projets collectifs. À titre d’illustration, Solon a mis en place un fonds local de transition permettant de financer des petits projets citoyens à hauteur de 2000 $. Ce fonds est géré par les membres de Solon qui décident démocratiquement de l’attribution des demandes. Il est alimenté par des dons et le surplus des activités du Lab Transition.

Collectiviser les entreprises

Les entreprises sont incitées à adopter un modèle coopératif ou d’organisme sans but lucratif. À l’interne, nous encourageons les expériences d’autogestion ou d’horizontalité et la démocratisation des processus décisionnels par le consensus. Nous faisons davantage connaître les entreprises adoptant des modèles de coopératives de solidarité ou de travail, comme Molotov, la première coopérative de communication à but non lucratif au Québec. Les membres de cette coopérative ont décidé de travailler sans patron et de choisir les projets qui correspondent à leurs valeurs. Ils et elles accompagnent des organismes, syndicats, personnalités publiques, etc.

Les licences publiques sont rendues obligatoires. Nous créons des incitatifs au partage de connaissances, de techniques, d’outils et à la gestion des ressources en commun entre entreprises. En temps de crise, les entreprises sont mises à contribution pour trouver des solutions aux problèmes collectifs (production de denrées ou produits nécessaires à la société, ouvertures de locaux-usines).