Récit de la transition : Société post-croissance

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Définition

Définition : Nous rejetons la surconsommation et l’accumulation et prenons en compte les limites de disponibilité des ressources.

Le concept de post-croissance vise à repenser notre mode de développement capitaliste orienté vers la croissance économique. La société post-croissance tend à la sobriété matérielle, l’accroissement de la capacité d’épanouissement des humains et du bien-être des individus, et est orientée par la réponse à des besoins vitaux et sociaux dans le respect des limites des écosystèmes terrestres. Nous visons ici un modèle qui rejette la surconsommation et l’accumulation, et qui prend en considération les limites de disponibilité des ressources et la nécessité de trouver un équilibre entre ce que l’humain prélève par ses activités et la régénération naturelle des écosystèmes (Méda, 2018; Gaîté Lyrique, 2020; Bourdon, 2020).


Ce qu’on déconstruit

Déconstruction : Les prix sont bas uniquement parce que nous ne prenons pas en compte les effets négatifs de la production de marchandises à bas coûts.

Le système économique est structuré autour du mythe de la croissance économique (la productivité, la production, l’exploitation des ressources pour entretenir la croissance), alors que ses effets sont de moins en moins significatifs en matière d’amélioration de la qualité de vie. Les gains économiques des circuits longs permettent de produire des marchandises à bas coûts. Ces prix sont bas uniquement parce que les

effets négatifs de cette production (main-d’oeuvre sous-payée et exploitée, destruction de l’environnement) ne sont pas pris en compte. Dans nos vies quotidiennes, cela se traduit par trois principaux éléments : notre rapport aliénant au travail, la surconsommation de biens et la poursuite de l’enrichissement individuel plutôt que collectif. La société de surconsommation pousse les individus à désirer des biens dont ils n’ont pas réellement besoin. Nous sommes pris dans de fortes contraintes matérielles et symboliques qui entraînent un besoin de travailler plus pour acquérir toujours plus d’objets. Dans le même temps, certains biens sont accaparés par une minorité de personnes, occasionnant de fortes inégalités d’accès à ceux-ci (par exemple, le logement ou la saine alimentation). Nous vivons dans l’idée que les possessions matérielles garantissent un certain bonheur. Nous entretenons le mythe que travailler nous garantit un certain confort matériel, et que c’est dans ce confort que nous nous épanouissons. La poursuite de ces besoins par la surconsommation vient combler un manque d’épanouissement personnel (intellectuel, spirituel, relationnel, etc.). Or, le travail est instrumentalisé comme un outil de croissance économique, et notre force de travail est vendue pour enrichir une minorité de personnes. Cette culture de travail touche toutes les sphères de la société, même la sphère publique et le secteur communautaire, et il est considéré normal de vivre dans une société où les biens et services sont accessibles 24h sur 24. Enfin, la poursuite d’un confort matériel toujours plus grand conduit à plus d’endettement pour la plupart d’entre nous.


Ce à quoi on aspire

Aspiration : Nous ne poursuivons plus un idéal de propriété privée exclusive et cherchons à favoriser la mise en commun des biens et des services.

Nous aspirons à une société soutenable, respectueuse des limites biophysiques de notre planète, et socialement équitable et résiliente. Il s’agit d’élaborer un projet de société au-delà de la croissance (Aeschimann, 2017) et reposant sur des valeurs et finalités autres qu’économiques et au sein de laquelle les richesses sont réparties équitablement. Notre économie doit encourager les échanges, l’économie circulaire, l’autosuffisance. Cela signifie que nos attentes en matière de confort matériel sont davantage en adéquation avec les ressources disponibles et que nous adoptons des modes de vie de simplicité volontaire. Nous ne possédons que ce que nous utilisons et ce dont nous avons besoin. Nous changeons nos rapports individuels aux contraintes matérielles. Nous acceptons de gagner moins d’argent et de diminuer l’accumulation de richesses. Les biens, services et savoirs sont partagés, donnés ou échangés, plutôt que privatisés. Nous ne poursuivons plus un idéal de propriété privée exclusive et cherchons à favoriser la mise en commun des biens et des services. Les entreprises locales répondent directement aux besoins de la population et ne sont plus dépendantes des marchés financiers.


Comment on s’y rend

Redécouverte de la synergie entre nous et nos environnements

Nous réalisons un changement dans les mentalités individuelles, en prenant en compte l’impact que nos actions ont sur notre environnement. Cela passe par des programmes d’éducation et de sensibilisation, et par l’accès à l’information sur l’impact de nos gestes quotidiens. Une première étape en ce sens serait tout d’abord de mesurer notre empreinte écologique individuelle. Il existe plusieurs sites Internet permettant de mesurer notre empreinte écologique. Au Québec, le média Unpointcinq en recense quatre (Lagueux-Beloin, 2019). Celui du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques permet de sensibiliser les jeunes et leurs parents sur les choix en matière de logement, d’alimentation, de consommation, de transports. L’empreinte carbone est ensuite calculée en nombre de planètes (MELCC, s.d.). La Chaire en éco-conseil de l’Université du Québec à Chicoutimi a créé un calculateur d’émissions de GES en fonction des déplacements et de choix de transports et propose de les compenser par la plantation d’arbres (Carbone Boréal, 2020).

Favoriser la réutilisation et la revalorisation

Nous limitons la production de produits neufs et favorisons le réemploi par des usines locales de réparation. Nous ne produisons du neuf que lorsque c’est nécessaire et au juste prix de l’exploitation des ressources. L’organisme Insertech est une entreprise d’insertion qui forme et emploie de jeunes adultes à la revalorisation de matériel informatique. Cette entreprise lutte ainsi contre la surconsommation et la surproduction d’ordinateurs, ainsi que contre la pollution et la surexploitation des ressources naturelles qui en découlent. Elle organise également des « réparothons » afin de former les gens à la réparation de leurs ordinateurs et appareils électroniques. Il existe d’autres entreprises de ce genre qui revalorisent des objets brisés ou utilisent des matériaux recyclés, comme SOS Vélo, spécialisé dans le reconditionnement de vélos usagés, ou Les belles bobettes, qui produit des sous-vêtements à partir de chutes de tissus qui seraient normalement jetées.

Généraliser les systèmes d’échanges libres

Moyens : Nous échangeons des biens par des systèmes de trocs.

Nous utilisons nos espaces communautaires pour partager nos savoir-faire et échanger des biens par des systèmes de troc (« réparothon », ateliers collectifs de réparation, de prêts et échanges d’objets, etc.). Nous gérons en communs des infrastructures qui permettent de produire en dehors du marché (jardins collectifs, usines coopératives, cuisines collectives). Par exemple, nous partageons nos outils du quotidien grâce à des bibliothèques d’outils, comme La Remise, ou des systèmes de partage d’autos, comme LocoMotion. Ainsi, nous utilisons les objets à leur plein potentiel et nous évitons d’en fabriquer trop pour rien.

Valoriser des systèmes d’échanges non monétaires

En valorisant des systèmes d’échanges non monétaires, nous pouvons redéfinir la valeur donnée aux choses que nous consommons, et ainsi favoriser un mode de consommation centré sur les besoins réels. Nous pouvons, par exemple, échanger les objets et services en fonction du temps plutôt que de l’argent. Nous pouvons ainsi accorder de la valeur au temps non rémunéré et développer des systèmes alternatifs d’échanges. Nous donnons de l’importance au temps investi dans la communauté en le rétribuant par des services et biens de base plutôt que de l’argent.

Produire et consommer localement

Nous revoyons collectivement notre façon de consommer par de l’éducation sur les impacts de la surconsommation. Nous favorisons un mode de vie sobre. Nous surtaxons les produits importés et offrons des alternatives locales. Nous remettons en question la consommation en favorisant les circuits courts. Nous mettons en place des règles, lois et taxations sur les produits importés visant à diminuer les flux globaux de transports de marchandises. Nous favorisons une agriculture biologique et de proximité. Le Réseau des fermiers·ères de famille rassemble une centaine de fermes biologiques de partout au Québec qui distribuent des paniers de légumes et de fruits aux résident·e·s de leur territoire proche, dans une logique de mise en marché en circuits courts.

Payer le coût réel (internaliser les externalités)

Nous prenons en considération l’ensemble des paramètres d’une production dans son coût (par exemple, les coûts environnementaux et sociaux des exploitations minières sont reportés sur le prix des produits utilisant ces matières premières). Ainsi, les biens trop coûteux sur le plan environnemental et social devraient être de moins en moins accessibles financièrement. Cela implique également de sensibiliser les gens au coût réel de ces produits et d’indiquer la provenance des matériaux qui les composent. L’épicerie zéro déchet Loco affiche sur les produits vendus des étiquettes indiquant leur provenance (local ou importé) et leurs caractéristiques (biologique, équitable). Ce système pourrait être généralisé à l’ensemble de nos épiceries et commerces de consommation courante.

Gouvernance locale et démocratique

Nous mettons en place une gouvernance participative pour choisir nous-mêmes la façon dont nous utilisons les ressources publiques (planification du bas vers le haut). Nous favorisons des mécanismes de prise de décision qui impliquent le plus grand nombre de personnes et d’organisations, afin que les lois et politiques publiques soient orientées vers l’amélioration de la qualité de vie et le bien-être, plutôt que vers la croissance économique (participation citoyenne, démocratie délibérative, budgets participatifs, etc.). Nous mettons en place une gouvernance locale inspirée du municipalisme et des communs, une gouvernance partagée où chaque voix compte et où chacun·e peut prendre part à la prise de décision collective. Les budgets participatifs sont des exemples concrets de cette gouvernance partagée. Il en existe plusieurs dans le monde et Montréal en a aussi mis un en place à la fin de l’année 2020, avec une enveloppe de 10 millions de dollars pour financer des projets citoyens en transition écologique. Six cent vingt idées de projets ont été soumises dans un premier temps, puis trente-cinq projets plus concrets ont été approfondis. Les Montréalais·es ont pu proposer des projets pour leurs quartiers et ont finalement été invités à voter à l’été 2021 pour leurs projets préférés. Sept projets ont été retenus et sont ainsi financés par les fonds publics. Cette forme de gouvernance favorise la mise en oeuvre de projets répondant aux besoins et aspirations des résident·e·s.

Un salaire minimal et un salaire maximal

Le salaire minimum est implanté dans plusieurs pays dans le monde : Canada, France, Allemagne, Maroc, etc. Chaque pays le définit différemment. Au Québec, il s’élève en 2022 à 14,25 $ par heure. Toutefois, pour plusieurs experts, ce niveau de revenu est insuffisant pour satisfaire aux besoins essentiels des travailleurs et travailleuses. En outre, les échelles salariales induisent deux choses : il faut travailler beaucoup pour gagner le plus d’argent possible, et les compétences et savoirs ne sont pas tous rémunérés de la même manière. Des salaires ou revenus très élevés côtoient des salaires minimaux trop faibles pour assurer une vie viable et décente, ce qui entraîne des inégalités grandissantes. Ainsi, l’établissement d’un salaire maximal permettrait de réduire les inégalités en limitant l’accumulation des biens aux mains d’une minorité. Cela peut se faire de plusieurs manières, par exemple en établissant un seuil maximal de revenu, comme c’est le cas en France pour les revenus des élu·e·s. Une autre solution est également de surtaxer les revenus au-dessus d’un certain seuil. C’est le cas par exemple à Portland, aux États-Unis, qui a décidé de surtaxer les entreprises ayant de trop grandes inégalités salariales.

Ces mesures favorisent la réduction des inégalités, mais pourraient aussi avoir un effet sur la réduction du temps de travail, puisque les salaires ne peuvent dépasser un certain plafond. Cela favorise aussi une limitation de la surconsommation.

Réduction de la publicité et réorientation des espaces publicitaires

Moyens : Nous cessons de promouvoir l’achat individuel de biens matériels par la publicité, et nous transformons les espaces publicitaires en œuvres d’art et murs végétaux.

Nous cessons de promouvoir l’achat individuel de biens matériels par la publicité, car nous savons que cette exposition constante nous pousse à consommer des choses dont nous n’avons pas besoin. Par exemple, les mouvements anti-publicités revendiquent l’abolition des publicités dans l’espace public. L’Arrondissement du Plateau-Mont-Royal a récemment adopté un décret interdisant les panneaux publicitaires, afin de préserver le patrimoine urbain. D’autres mouvements suggèrent aussi d’interdire les publicités pour des choses qui nuisent à l’environnement, comme les publicités pour les automobiles, de la même manière que les publicités pour le tabac ont été interdites, car cela nuit à la santé publique.

Transition énergétique et réduction de notre empreinte écologique

Nous visons plus d’efficacité énergétique dans nos infrastructures et nos bâtiments. Nous bâtissons avec des matériaux durables et locaux. Nous réduisons les pertes d’énergies dans nos bâtiments, par exemple par une meilleure isolation, des systèmes de ventilation et des matériaux adaptés aux conditions climatiques locales. Ces changements passent par des politiques publiques, à la fois par des réglementations strictes sur les nouvelles constructions et la mise en place de programmes de soutien à la mise à niveau des constructions anciennes. Nous développons des systèmes de production d’énergies renouvelables et décentralisons la production énergétique. Le projet Celsius mené par Solon vise à réduire la dépendance des Montréalais·es aux énergies fossiles, comme le gaz ou le mazout, en créant des infrastructures de géothermie dans les ruelles de Rosemont–La Petite-Patrie. Ces infrastructures, gérées par une coopérative d’utilisateurs et utilisatrices, permettront une adaptation aux changements climatiques grâce à un système de chauffage l’hiver et un système de climatisation l’été.